Interview
Arnaud Rousseau : "la colère, ça ne fait pas un projet"
Le président de la FNSEA assiste ce jeudi 9 octobre au conseil d'administration de la FDSEA du Tarn à Montans. Pour nous, il revient sur son parcours, les sujets d’actualité et les échéances à venir.
Le président de la FNSEA assiste ce jeudi 9 octobre au conseil d'administration de la FDSEA du Tarn à Montans. Pour nous, il revient sur son parcours, les sujets d’actualité et les échéances à venir.

> Comment êtes-vous arrivé dans le milieu agricole puis dans le syndicalisme ?
Arnaud Rousseau, président FNSEA : “Je suis issu d’une ferme familiale qui existe depuis 5 générations, située dans un petit village de Seine-et-Marne, Trocy-en-Multien. J’y ai passé toute ma jeunesse. J’ai ensuite effectué des études de commerce puis travaillé pour l’Union nationale des coopératives avant de me lancer dans le courtage. En 2002, j’ai fait le choix de reprendre la ferme familiale. On cultive aujourd’hui du colza, maïs, tournesol, blé, betterave, et cultures légumières de plein champ. Mon épouse est aussi agricultrice et a repris l’exploitation de ses parents en 2006. Mon parcours dans le syndicalisme démarre en 2005, lorsque je fais la rencontre de Xavier Beulin (ancien président de la FNSEA). Je démarre dans la FDSEA du 77 puis je suis élu administrateur de la FOP (Fédération française des producteurs d’oléagineux et protéagineux). En 2011, je deviens secrétaire général puis président de la FDSEA de Seine-et-Marne de 2013 à 2017. En février 2017, j’accède à la présidence de la FOP et du conseil d'administration du Groupe Avril, suite au décès de Xavier Beulin. Enfin, je suis élu 1er vice-président de la FNSEA, avant d'accéder à la présidence en avril 2023. En parallèle, je reste très attaché à la vie rurale et locale, je suis maire de ma commune de Trocy-en-Multien depuis 2014.”
> Vous êtes régulièrement la cible de critiques vis-à-vis de vos postes à responsabilité et comme quoi vous ne représenteriez pas tous les agriculteurs. Que répondez-vous à cela ?
“Je réponds simplement que la FNSEA est une fédération nationale qui représente tous les territoires et tous les agriculteurs. En France comme dans le Tarn, on a des éleveurs purs, des éleveurs en polyculture, des céréaliers, des viticulteurs et tant d’autres. La pluralité des profils se retrouve chez nous. Le sujet n’est pas de cibler la taille de mon exploitation mais plutôt de voir l’ambition que l’on porte pour toutes les agricultures. Mes prédécesseurs Christiane Lambert ou Xavier Beulin avaient des profils différents au mien mais ce n’est pas ce qui importe, c’est la vision que la FNSEA apporte. Je suis né dans l’agriculture et suis fier de mes racines. En tant que président, je veux donner le goût d’entreprendre dans ce métier. Lorsque l’on porte ses responsabilités, on est forcément exposé à la critique, cela fait partie du jeu.”
> Mercosur, taxes américaines, loi Duplomb… les sujets d’actualité sont nombreux et les agriculteurs craignent de plus en plus pour la pérennité de leurs exploitations. Quelle est la position de la FNSEA face à ces menaces ?
A.R : “Pour commencer, je pense qu’il est essentiel pour notre métier de continuer à commercer et d’être ouvert sur le monde. Maintenant, il est impératif que les règles que l’on impose à nos agriculteurs français soient respectées partout en Europe et dans le monde. Chacun doit avoir les mêmes droits et mêmes devoirs. Mais la réalité aujourd’hui, c’est que nos producteurs ne peuvent pas gagner leur vie dans l’agriculture, ils ne peuvent pas se construire un avenir et l’agriculture française n’a plus de vision. Dans une société où le moins cher prime de plus en plus, il est important de rappeler l’importance de l’alimentation locale et de défendre notre souveraineté alimentaire. Et d’autant plus dans un contexte politique très incertain. Jeudi dernier (2 octobre), avec les Jeunes Agriculteurs, j’ai rencontré mon cinquième Premier Ministre différent (ndlr. : Sébastien Lecornu a finalement remis sa démission ce lundi 6 octobre). Nous lui avons présenté nos arguments. On attend du prochain Gouvernement qu’il porte une vraie vision pour nos agriculteurs et de la stabilité.”
“Mes prédécesseurs Christiane Lambert ou Xavier Beulin avaient des profils différents au mien mais ce n’est pas ce qui importe, c’est la vision que la FNSEA apporte”, Arnaud Rousseau, président FNSEA
> Des échéances importantes arrivent en 2026 pour le réseau FNSEA, avec des élections départementales, régionales et nationales. Quel message apporter aux adhérents de la FDSEA du Tarn après une année marquée par les élections Chambre d’agriculture ?
“On a vu dans le Tarn, comme dans d’autres départements, la colère s’exprimer dans le vote en donnant la faveur à la Coordination Rurale d’une courte tête. On a compris cette colère qui est multifactorielle. Mais la colère, ça ne fait pas un projet et ça ne construit pas un avenir. On a plus que jamais besoin de construire un plan pour sauvegarder nos filières françaises. Et la FNSEA reste le syndicat le plus à même de faire cela. Là où nous nous mobilisons sur le terrain pour exprimer nos désaccords, notamment avec le Mercosur, nos concurrents sont absents. J’entends que c’est dur aujourd’hui pour les viticulteurs du Gaillacois, pour les producteurs de grandes cultures, les éleveurs et les arboriculteurs tarnais mais nous avons plus que besoin d’être soudé pour construire une stratégie d’avenir, d’autant plus que nos politiques sont absents. Et cela passera par une mobilisation de tout le réseau.”
> Un chantier de transformation de la FNSEA est en cours. Quelles en sont les grandes lignes ?
“On est face à plusieurs constats. L’agriculture française est en pleine évolution et l’engagement collectif est plus difficile à obtenir. Face à cela, la FNSEA ne peut plus rester sur ses vieux schémas. Nous devons amener plus d’expertise et d’accompagnement, tout en renforçant la proximité avec nos adhérents et le dynamisme. Pour faire en sorte que demain soit encore plus collectif. Cette transformation doit s’opérer avec tout notre réseau de fédérations locales et associations spécialisées. On attend du terrain et des agriculteurs tarnais qu’ils s’engagent dans ce projet."